1.1.18

Perec serait dans l'escalier

pour Vfois4, in memoriam

 Je pourrais avancer l'idée que Perec était obsédé par la numérologie de ses nom-prénom, telle que
NOM PRENOM = 123 = GEORGES PEREC,
au point d'avoir conçu son opus magnum, La Vie mode d'emploi (la VME), autour de ce nombre 123, en choisissant le mode de numérotation des cases de son immeuble de telle façon qu'autour de son centre névralgique, le milieu de l'escalier, deux numéros de cases symétriques par rapport à ce centre totalisent 123.
  Perec aurait choisi de placer son premier chapitre en cet exact centre, entre les cases 66 et 57 (somme 123), et il lui aurait donné un titre de valeur 123,
DANS L'ESCALIER, 1 = 123.
  Perec aurait également choisi le nom de son personnage principal pour pouvoir terminer sur le chapitre
BARTLEBOOTH, 5 = 123.

  Il n'y a d'ailleurs rien d'impossible à ce que Perec ait eu recours à de tels calculs, et l'Université a cautionné des thèses lui attribuant des intentions numérologiques bien plus contournées, mais ce n'est pas mon problème ici, la découverte de ces relations s'étant produite lors d'une démarche si riche en coïncidences irrationnelles que les intentions effectives de Perec me semblent devoir demeurer indécidables.

 Pendant l'écriture du précédent billet, l'article Physical Graffiti du blog de Patrick Bléron m'a fait connaître ce double album de même nom de Led Zeppelin, avec les 16 lettres du titre réparties sur 4 étages de 4 fenêtres des immeubles jumeaux en couverture de la pochette:
  Ceci m'a aussitôt fait penser à La Vie mode d'emploi, encore plus lorsque j'ai appris que l'album était paru en 1975, la VME décrivant tout ce qui se passe dans l'immeuble du 11 rue Simon-Crubellier le 23 juin 1975 vers huit heures du soir.
 D'autres montages sont présents à l'intérieur de la pochette, avec les lettres remplacées par des images ou photos de personnages divers, par exemple Elizabeth II, dont le couronnement est associé au plus long chapitre de la VME, ou Laurel et Hardy, formant l'une des contraintes "Couples".

  Le projet de la VME était déjà avancé en 1975, mais Perec ne s'est lancé dans la rédaction effective qu'à l'automne 1976. Des sources bien antérieures à Led Zep utilisaient des montages avec des immeubles, comme un dessin de Saul Steinberg en 1949 ou la couverture du Naïf locataire en 1956 de Paul Guth (PG comme Physical Graffiti, qui était le nom d'une boutique de vêtements d'occasion au 96 St Mark's Place, l'un des deux immeubles).

  Mais GP m'intéresse bien plus... La disposition des 16 lettres du titre de l'album (tiens La Vie mode d'emploi a aussi 16 lettres) en un carré 4x4 m'a donné la curiosité d'analyses numériques.
  Les 16 lettres ont pour valeur 169, carré de 13, et leur répartition en colonnes m'est évocatrice:
P I G F = 38
H C R I = 38
Y A A T = 47
S L F I = 46
  Les deux premières colonnes ensemble (l'immeuble au n° 96) donnent 76, valeur de GEORGES, tandis que la suivante donne 47, valeur de PEREC.
  La valeur 46 des 4 autres lettres pourrait rappeler que Perec est mort 4 jours avant son 46e anniversaire, mais je vois surtout que ces lettres SLFI se réarrangent en FILS.

  En 1959 Perec écrivait à son ami Jacques Lederer que son Condottière en cours d'écriture devait être un « livre de la défilialité »:
 J’ai tant souffert d’être ‘le fils’ que ma première œuvre ne peut être que la destruction totale de tout ce qui m’engendra.
  L'orphelin Georges a été pris sous tutelle par son oncle Bienenfeld. Les Bienenfeld avaient deux filles, et donc tout l'espoir d'une famille juive normalement constituée s'est porté sur ce ‘fils’, das Sohn...
 Dans Le Condottière qui n'a été édité qu'en 2012, le faussaire Gaspard Winckler assassine son employeur, Anatole Madera. Le prénom du personnage Gaspard Winckler, présent sous divers avatars dans deux autres romans de Perec, est très probablement issu de l'orphelin Gaspard Hauser, et Perec semble avoir été marqué par ses deux approches verlainiennes, les 16 vers de Gaspard Hauser chante, dont il a proposé 15 "micro-traductions", et Scénario pour un ballet, où Gaspard retrouve son père qui est un millionnaire anglais, et le tue.
  David Bellos a remarqué le cousinage avec l’histoire centrale de la VME, où l'artisan Gaspard Winckler mène, pour une raison inconnue, une vengeance de longue haleine à l'encontre de son employeur, un millionnaire anglais qui, à défaut d’être son père, est au moins un Per…cival.
  Parsifal Frychtig ? (anagramme de Physical Graffiti)

  De multiples hypothèses ont été proposées pour le nom Winckler, sans qu'aucune ne semble décisive. Le billet précédent m'a fait m'intéresser à une curiosité. Alors que dans la VME Winckler a eu une femme, Marguerite, un membre de la liste Perec a signalé récemment que la femme d'Auguste Lumière était née Marguerite Winckler. Vérifiant la chose, je me suis avisé qu'il y avait eu 4 mariages entre les fratries Lumière et Winckler.
  Auguste a donc épousé Marguerite Winckler le 31 août 1893, le jour même où Jules Winckler épousait Juliette Lumière. Auparavant, Louis Lumière avait épousé Rose Winckler le 2 février, et Charles Winckler épousera France Lumière le 9 juin 1903...
  Je remarque
LOUIS = 76   FRANCE = 47, somme 123,
CHARLES = 66  ROSE = 57, somme 123,
ce qui me ramène à une des grandes curiosités vues lors de mes premières incursions dans la VME.

  On sait que l'immeuble est réparti en 100 cases visitées tour à tour selon la polygraphie du cavalier, chaque chapitre décrivant ce qui se passe dans la case, avec souvent des sauts dans l'histoire de l'immeuble et de ses occupants.
  Perec a identifié chaque case par un indicatif de deux chiffres, correspondant à l'étage et à la position de gauche à droite dans l'immeuble, en partant de 11 pour la case supérieure gauche, chaque indicatif apparaissant en principe dans le chapitre correspondant.
  Les paliers des appartements des 6 étages correspondent à 12 chapitres Escaliers, dont les indicatifs sont 36 à 86 pour les paliers gauches, 37 à 87 pour les paliers droits. Perec a choisi de débuter son opus magnum sur le palier de Bartlebooth, case 66, et le trajet du cavalier (Percival?) qu'il a choisi lui a permis de l'achever dans la pièce la plus éloignée de son appartement, la case 61.
 Le chapitre 1 montre une femme, employée d'une agence immobilière, venant visiter l'appartement au sixième droite de Gaspard Winckler, mort en 1973, mais Perec la situe entre le troisième et le quatrième étage, ce qui signifie qu'elle est entre la case 66 (indiquée par un porte-clés double-six) et la case 57, et que nous sommes au centre névralgique des 12 cases Escaliers, et de l'immeuble, puisqu'il y a deux niveaux supérieurs d'ex-chambres de bonnes, et deux niveaux inférieurs, rez-de-chaussée et caves.  Ci-dessous la reconstitution de la façade de l'immeuble donnée par Jacqueline Ancelot, une amie de Perec, où je me suis permis d'indiquer ce centre névralgique par un cercle orange. Dans la transformation effective des coordonnées en indicatif, le 10 devient 0.

  J'avais donc remarqué il y a quelque 20 ans que deux cases symétriques par rapport à ce centre névralgique avaient 123 pour somme de leurs indicatifs, avec un intérêt particulier pour les cases 66-57, entre lesquelles démarre le livre, et les cases 76-47, correspondant à GEORGES-PEREC.
  Voici donc que les mariages Winckler-Lumière m'amènent a trouver un ensemble de prénoms correspondant à ces valeurs 47-57-66-76, et ceci à quelques heures de la découverte d'un équilibre 76-47 associé à un montage à partir d'un immeuble découpé en cases...

  S'il est pour moi assez certain que ces deux derniers faits n'ont aucun rapport logique avec la VME, je ne peux néanmoins les considérer comme de "simples coïncidences",  et elles ont constitué le déclic qui m'a permis de dépasser un blocage rencontré quelques jours plus tôt.
  Le 2 décembre, Nicolas Graner proposait sur la liste Oulipo une nouvelle contrainte, l'échiquier verbal, constituant à placer sur un échiquier une série de mots, de façon à obtenir une lecture horizontale, une lecture verticale, et une lecture selon le parcours du cavalier. J'ai aussitôt pensé à utiliser ceci avec des lettres, en utilisant la grille de Perec.
  De premiers essais ont été très peu concluants, et j'ai abandonné l'idée pour un temps, envisageant de l'utiliser pour une grille 8x8.

  De telles réalisations exigent une forte motivation, et un point de départ qui m'a été fourni par les coïncidences du 14 décembre. J'ai d'abord placé sur la grille les lettres PHYSICAL GRAFFITI, avec les lettres médianes correspondant à la cage d'escaliers de Perec, aux étages 2-3-4-5 où sont situées les cases 76-66-57-47, et les autres lettres dans les cases extrêmes des appartements correspondants.
  En bref, voici ce à quoi je suis arrivé:
  Mes premiers essais m'avaient appris qu'il serait extrêmement difficile d'obtenir deux textes cohérents, aussi je me suis attaché au parcours du cavalier, limitant la lecture horizontale à une suite hétéroclite de mots.
  La perspective cavalière livre donc:
refus osé, poupins; oh laser infra Ys! l'aîné aimé nia à l'omis écart du coin; loi ionienne éructée, et cire allie lettre à lire G...

  J'admets que c'est peu clair. C'est un premier jet que j'envisageais de modifier ensuite, mais j'y ai renoncé après un coup d'oeil au Gématron. Ces 99 lettres ont pour valeur 1092, soit 4 fois 273, nombre qui entre autres est la gématrie de l'hébreu arba', "quatre", alors que j'étais parti d'un jeu de 4x4 lettres.
 
  Par ailleurs, l'ajout de la lecture horizontale conduit à 8 fois 273, soit 8x13x21, trois nombres de Fibonacci consécutifs.

  Voici cette lecture horizontale:
LA SOI EST MUR UN EO PIC OR LOIN SOC EDO PERIL HYLAS ILI LACAU ALGERIE RAS EFFILE AI TE AIR ISIE NE MER ON ECARTE NI UN ENTENTE

et un éventuel jeu de définitions y correspondant:
Article de vie comme de mort - Théorie du quant-à - Pense - Entre Percival Bartlebooth et Simon-Crubellier - Premier terme de la suite de Fibonacci - Bilatéralité - Hauteur où on peut tomber - Présent dans 43 onzains - Queneau pour Rueil - Retourne la terre - Capitale impériale - En la demeure de Bartlebooth - Cave canem - Coule dans les deux sens - Verbicruciste - Parac aurait pu y être parachuté - Les cheveux de Perec en 1958 - L'oeil de la marionnette indienne du bureau de Bartlebooth - Edenté - Il a la forme de la lettre mais ne s'écrit pas comme elle - Perec aimait celui de la ville - Père Perec - Perec l'est le 7 mars 1936 - Souvent peinte par Bartlebooth - Vague sujet - Le genou d'un Homme Libre - En exclusivité - Second terme de la suite de Fibonacci - Peut être bonne dans les chambres de bonnes

  Voici un autre aspect de la grille, avec les numéros des chapitres associés à chaque lettre:
  Les chapitres Escaliers sont en bleu.

  Mon texte contient tout de même des allusions à la VME, avec notamment cet écart du coin, évoquant la décision de Perec de supprimer le chapitre correspondant au coin inférieur gauche de l'immeuble. Après coup je constate que DU COIN a pour valeur 66, or le chapitre supprimé correspond à la 66e position du cavalier.

  A cause des positions imposées des lettres PHYSICAL GRAFFITI, le G s'est trouvé correspondre au dernier chapitre, lequel finit dans la VME par la lettre W, initiale de Winckler peut-on supposer. Ma lettre à lire G peut conduire à Gaspard ou Georges, ou encore au flou Souvenir d'enfance, qui n'est en rien un W mais une lettre ressemblant à un G inversé.

  Le mot graffiti n'apparaît qu'une fois dans la VME, chapitre 28 ou Dans l'escalier, 3, d'indicatif 47
  Toujours est-il que dans ce chapitre 28 la narration rejoint Valène, lequel est en fait dans la case correspondant au Chapitre 51, et fait partager ses pensées pessimistes sur l'avenir de l'immeuble:
La rue ne sera plus qu’une suite de façades aveugles — fenêtres semblables à des yeux sans pensée — alternant avec des palissades maculées d’affiches en lambeaux et de graffiti nostalgiques.
  Ceci se passerait avant que les immeubles ne soient rasés pour laisser place à Horizon 84, vaste ensemble comportant 722 appartements divers et 47 magasins et services.

  Les 3 premiers chapitres Escaliers sont titrés Dans l'escalier, 1 à 3, les 9 autres Escaliers, 4 à 12 (mais dans la Table des Matières ils apparaissent sous la seule forme Escaliers, 1 à 12). J'ignore si quiconque en a envisagé une interprétation, mais je constate ceci:
Dans l'escalier, 1 = 122+1 = 123, selon la prise en compte immédiate des nombres par le Gématron.
  Ainsi ce premier chapitre que Georges Perec (=123) a choisi de faire débuter entre les cases 66 et 57 (somme 123) de l'immeuble peut-il aussi être un 123. Les Belges Willy Wauquaire, à gauche, et Brecht Evens, à droite, se sont essayés à illustrer les 100 cases de l'immeuble, et voici comment ils ont rendu les 12 cases Escaliers, ou 6 paliers.
  Ils ont tous deux situé les marches montantes à droite, ce qui à mon sens contrevient au texte qui fait monter la dame de l'agence à partir de la case 66, le palier gauche du troisième étage. Du moins Willy la place-t-il de ce côté gauche, tandis que Evens la montre sur la deuxième marche à droite.
  De toute manière, si le texte est respecté (mais Perec y commet plusieurs erreurs de latéralité), escalier et ascenseur devraient être devant les paliers (sinon l'appartement de Bartlebooth serait au troisième droite pour qui arrive sur le palier).

  Willy est l'auteur des Outils pour la Vie mode d'emploi, rassemblant tout ce qui est connu des contraintes du livre, et j'avais ces Outils sous les yeux lorsque j'ai appris par la liste Perec sa mort le 1er décembre. Je lui dédie ce billet. Ces Outils sont disponibles sur le site de l'Association Perec.

  Les chapitres Escaliers 1-2-3 dans la Table des Matières ont donc à leurs emplacements pour titres Dans l'escalier 1-2-3 (123?), et le dernier est le chapitre 28, correspondant à la case 47, PEREC.
  Ensuite vient le chapitre 36, Escaliers, 4, avec
ESCALIERS 4 = 95 = WINCKLER.
  Tiens, et ce nombre 95 apparaît aussi dans le jeu 66-57 des cases entre lesquelles débute le livre, correspondant aux chapitres 1-94, somme 95 donc, mais une autre approche est possible.
  A partir du chapitre 66, les chapitres de la VME ont une double numérotation sur le Cahier des Charges tenu par Perec, en conséquence de l'élimination du chapitre correspondant à la 66e position du cavalier, ainsi le chapitre 94 correspond en fait à la 95e position du cavalier (ci-dessus, le plan des chapitres établi par Perec avant l'écart du chapitre 66, avec les parties communes rayées (escaliers, sous-sol) et les 5 cases de l'appartement de Bartlebooth entourées, de même que la chambre de son valet Smautf).
  Ainsi la dame qui vient visiter l'appartement de
GASPARD = 66 WINCKLER = 95
se trouve-t-elle entre la case 66 de l'immeuble et la position 95 du cavalier.
 J'ai été conduit à ces calculs par les quatre mariages ayant réuni les réelles familles Lumière et Winckler, et plus spécialement par les unions de Louis et France Lumière avec Rose et Charles Winckler, et parce que les valeurs de ces Winckler 57 et 66 correspondent aux cases entre lesquelles débute la VME.

  Il y a plus éblouissant encore, car les conjoints Lumière de ces Winckler sont
LOUIS = 76 et FRANCE = 47,
correspondant à l'exact découpage de GEORGES PEREC, lequel a précisément fait se marier un Louis et une France. Il s'agit de Louis Gratiolet, petit-fils de Juste Gratiolet, premier propriétaire de l'immeuble de la VME, dont la vie rappelle celle du réel Jacques Bienenfeld, un aventurier flamboyant ayant fait fortune puis subi la crise de 1929. Ce Louis a donc épousé à Oléron France Lidron; ils ont eu en 1920 un fils, Olivier.

WINCKLER+LUMIERE = 95+83 = 178,
nombre qui m'a aussitôt évoqué l'une des dernières oeuvres achevées de Perec, quelques mois avant sa mort, un épithalame composé pour le mariage de ses amis tunisiens Kmar et Nour, le 15 août 1981.

  Noce de Kmar Bendana & Noureddine Mechri compte 10 strophes, 5 strophes impaires composées à partir des lettres de l'épouse, incorporant à chaque étape une lettre du nom de l'époux, et vice-versa pour les strophes paires. 
  Sur ses brouillons, Perec a noté pour chaque strophe les contingents de lettres autorisées, ainsi que les termes d'une suite de Fibonacci s'achevant par 68 et 110 pour les strophes 9 et 10. Ce n'est qu'à l'occasion de mon mariage, en 2014, que je me suis avisé que ces nombres correspondent aux contingents initiaux de lettres
KMARBEND = 68
NOUREDIMCH = 110
  68+110 = 178, comme Winckler+Lumière, or Perec nommait toujours son ami "Nour", et nour signifie "lumière" en arabe.

  L'autre personnage principal de la VME est Bartlebooth, et on pourrait se demander si Perec n'aurait pas choisi ce nom pour sa numérologie, car, alors que le premier chapitre de la VME est
DANS L'ESCALIER, 1 = 123,
le dernier chapitre a pour titre
BARTLEBOOTH, 5 = 123.

  Je suis ébahi par le calcul
PERCIVAL BARTLEBOOTH + GASPARD WINCKLER = 204+161 = 365
car il me paraît certain que j'ai dû étudier de près les valeurs de ces deux principaux personnages de la VME, lorsque je prêtais à Perec des intentions numérologiques de cet ordre, et j'ai justement découvert un motif remarquable 365 formé par des chapitres particuliers de la VME.

  48 cases de l'immeuble forment 24 paires symétriques par rapport au centre de l'escalier, telle que la somme des indicatifs de ces cases soit 123. Ceci me rappelle la découverte il y a 20 ans dans la VME d'une harmonie qui m'avait alors paru péremptoire.
  Le chapitre 87 de la VME, correspondant au salon de Bartlebooth, la case 65 jouxtant son palier, conte l'histoire des deux sociétés hôtelières aux noms de 24 lettres, MARVEL HOUSES INCORPORATED et INTERNATIONAL HOSTELLERIE, qui pour fêter leur association ont créé 24 complexes hôteliers dans 24 villes dont les noms répartis en colonne permettent de lire, accolés, les noms des deux sociétés. Les deux fois 24 lettres permettent l'égalité:
(24)+(24) = 296+280 = 576 =24x24

  A part ce rectangle cohérent de 48 cases, la numérotation particulière de la grille fait qu'il y a 28 autres cases formant des couples 123 (les colonnes d'ordonnées 3 à 9, 3 à gauche et 1 à droite), soit en tout 76 cases (GEORGES) formant 38 couples 123 (ce qui me rappelle les deux colonnes de valeur 38 sur la pochette de Physical Graffiti).

  Comme vu plus haut, le couple idéal 76-47 est réalisé par les Lumière LOUIS et FRANCE qui ont épousé les Winckler ROSE et CHARLES (57-66 correspondant aux cases entre lesquelles se trouve l'employée venue visiter l'appartement de Gaspard Winckler). Je n'ai pas encore étudié à quels chapitres, correspondaient ces cases 76-47-57-66, ce sont les chapitres 36-28-94-1, ou encore les positions du cavalier 36-28-95-1, ces derniers nombres totalisant 160 qui se trouve être la valeur de
LA VIE MODE D'EMPLOI = 160
  Le livre porte la rare indication romans, avec
ROMANS = 80, et donc la somme 240 pour cet ensemble.
  Mon précédent billet était précisément le 240e de Quaternité, et il m'a mené à la VME pour d'autres raisons que ce nombre 240 que je n'avais plus à l'esprit.
  Un 80 apparaît parmi les sauts du cavalier dans l'escalier auxquels j'ai fait correspondre les lettres HY-CA-RA-IT, à côté de 28-95-1-36. C'est le seul saut qui est opéré à l'intérieur de l'escalier (le 79 est deux étages en-dessous).

  Mon 240e billet a fait l'objet d'une fabuleuse coïncidence, non préméditée, avec les billets numéros 234 et 237, auxquels j'avais donné des titres de valeurs 513 et 273, au lieu de valeurs correspondant au rang du billet, comme souvent ces temps derniers, or l'égalité
513 = 273 + 240
m'est emblématique d'un fantastique équilibre entre les noms anglais des nombres de Fibonacci et leurs valeurs, découvert début 2014 à notre arrivée à Esparron.

  Comme 240 en tant que LA VIE MODE D'EMPLOI ; ROMANS m'était sorti de l'esprit, je n'ai pas songé que j'avais associé Perec à 273 pour ses deux noms "dorés"
GEORGES / PEREC = 76/47, et
GEORGE / BRETZLEE = 57/93, nom qui apparaît précisément dans la VME pour le nom de l'auteur du roman The Wanderers. Bretzlee figure pour bretzel ou pretzel, le biscuit troué dont l'appellation viendrait selon Perec du nom de sa famille, peretz signifiant "trou" (étymologie fort douteuse). Le titre traduit Les Errants, premier roman de Perec dont le manuscrit a été perdu.
  Je mentionnais ces deux noms dorés dans le billet recensant tous les cas 21-13 (cas 83), pour la somme 273, représentant d'abord pour moi le produit des Fibos 13x21. Ces noms pourraient se réarranger en
GEORGES BRETZLEE / GEORGE PEREC = 169/104 = 13/8.
169 est la valeur des 16 lettres PHYSICAL GRAFFITI, que je rapprochais de divers 273 rencontrés dans le précédent billet, et
PHYSICAL = 93 = BRETZLEE; GRAFFITI = 76 = GEORGES (je rappelle que la répartition verticale des lettres donne les totaux 76 pour l'immeuble de gauche et 93 pour celui de droite).

  Le fait que 3 chapitres Escaliers aient un titre différent pourrait amener à considérer ces chapitres par groupes de 3, avec
ESCALIERS = 91, multiplié par 3 = 273.
  Les 12 chapitres Escaliers, tels qu'ils figurent dans la Table des Matières, pourraient ainsi conduire, en négligeant leurs numéros d'ordre, à
12 x 91 = 1092, la valeur à laquelle je suis parvenu sans préméditation pour mon premier essai de parcours du cavalier, avec pour lettres imposées
PHYSICAL GRAFFITI = 169.

  Je n'ai pas encore décortiqué le double mariage du 31 août 1893 (je rappelle que le 31/8 vulgaire est aussi le 21/13 du calendrier pataphysique), où Auguste et Juliette Lumière ont épousé Marguerite et Jules Winckler. Ces 4 prénoms totalisent les valeurs
94 + 102 + 117 + 67 = 380,
un nombre qui m'évoque encore Perec, car le nom hébreu de sa famille, Peretz, en hébreu פרץ de gématrie 370, est devenu Perec lors de son arrivée en France, puis פרק de gématrie 380 lors des traductions en hébreu (où ce mot signifie "chapitre" !)

  Il y a beaucoup de possibilités avec ces 4 mariages, et je ne retiens que ce qui se passe du côté des Winckler.
  C'est donc Marguerite (=117) qui m'a conduit à ses frères et soeur
JULES CHARLES ROSE = 67+66+57 = 190.
  Je connais bien le couple doré 117-190, et encore via Perec. J'ai évoqué à maintes reprises son sonnet Vocalisations, et justement récemment dans mon billet 234 (2 fois 117) au titre de valeur 513, motivé par l'écriture d'un sonnet de 513 lettres à partir des 497 lettres de Vocalisations. Plusieurs de mes récritures de Vocalisations avaient réarrangé ses lettres pour obtenir diverses césures d'or, notamment 190-117-190 pour les nombres de lettres. C'était le cas de Consonnantisations que je redonnais dans ce billet.
  Le billet précédent m'amenait à une relation concernant le nombre 307, mais je n'avais pas calculé alors qu'il correspondait à ces 4 Winckler, et je ne me rappelais plus 307 en tant que section d'or des 497 lettres de Vocalisations.

  Une Marguerite au coeur doré  de Vocalisations. me rappelle une coïncidence sur Marguerite Neveux, réelle auteure d'une étude sur le nombre d'or, et nom rencontré sous cette exacte forme dans un roman bien antérieur d'Eric Rohmer, fervent amateur du nombre d'or.
  Le Points Sciences Le nombre d'or rassemble Radiographie d'un mythe, étude très critique de Marguerite Neveux, et La divine proportion, apologie de H.E. Huntley. J'avais vu ces initiales H-E-H correspondre aux nombres 8-5-8, soit le partage selon les deux césures dorées du nombre 21, 8e terme de la suite de Fibonacci, or mes césures d'or du sonnet précité concernaient aussi les pieds, 168, répartis en 64-40-64, ce qui est proportionnel à 8-5-8.
  Je n'avais pas en 2007 trouvé de renseignements sur H.E. Huntley, dit avoir été professeur dans une université anglaise, sans autre précision. Une nouvelle recherche m'a conduit à Ernest Huntley Hart, plus connu sous le nom Ernie Hart, Américain dessinateur et scénariste de comics, utilisant aussi les signatures EHH et H.E. Huntley, selon Wikipedia.
  Il me semble impossible que cet Américain puisse être l'auteur de La divine proportion, clairement anglais, et je trouve fabuleux que les deux auteurs associés aient des homonymes, fictifs ou non, alors que c'est une autre homonymie, sur Marguerite Winckler, qui m'a conduit à écrire ce billet.

  J'ai été amené à creuser cette homonymie, connue depuis quelques mois, dans le précédent billet, où s'est révélée une autre formidable homonymie entre fiction et réalité.
  En 2007 NEO a publié Les Orphelins du Mal, où il a imaginé les nazis avoir inventé le clonage dès les années 30, avec un premier essai de 5 clones. La plus accomplie était destinée à devenir la reine d'une ruche de clones sur son modèle, mais elle a refusé ce rôle et a dévoilé la conspiration par bribes dans des romans signés Marjolaine Papillon.
  En 2017 Fabrice Papillon publie Le dernier Hyver, où il imagine une conspiration féministe aboutir à la création de 5 clones dans les années 90. La plus accomplie, Marie, est destinée à devenir la reine d'une ruche de clones sur son modèle, mais elle refuse ce rôle...

  C'est l'auteur et son titre qui m'avaient conduit au premier 307 signalé plus haut,
FABRICE+PAPILLON + LE DERNIER HYVER = 44+95 + 168 = 307,
sans donc soupçonner que les prénoms dans la fratrie Winckler donnés dans ce même billet conduisaient à ce même total, avec le partage doré 117/190 entre Marguerite et les 3 autres.
  Je remarque que PAPILLON = WINCKLER = 95.

  J'avais été conduit à donner à ce billet un titre de valeur 240, réparti en 99 et 141, valeurs de THIRTEEN et TWENTYONE. Comme Papillon se devait de figurer dans ce titre, j'avais trouvé pour le second terme
PAPILLON TUE = 95 + 46 (= WINCKLER FILS),
ce qui m'évoque maintenant le "fils" Gaspard qui tue le Per-cival. Papillon tue lui dans son roman tous les hommes, pour ne laisser que des mères (qu'IL MEURE, LUI-MERE).

  Il m'est revenu que ces couples Lumière-Winckler étaient survenus pour moi à un moment pouvant correspondre à la fête juive des Lumières, Hanoucca, et effectivement Hanoucca courait cette année du 12 au 20 décembre. C'est le 14 décembre que j'ai appris les 4 mariages entre les deux familles, le 19 que j'ai composé mon parcours du cavalier inspiré par ces mariages (et par Led Zeppelin).
  Je ne crois avoir mentionné que deux fois Hanoucca dans Quaternité, dans ce billet de 2011 (qui était le 99e, THIRTEEN), et dans le très récent 237e billet, auquel j'avais donné un titre de valeur 273, Sous les pans du concombre, parce que je venais de découvrir le roman Sous l'aile du Concombre, d'un certain Henri Girard, homonyme du vrai nom de Georges Arnaud, lequel choisissait en 1950 de publier sous ce pseudonyme au moment où un réel Georges Arnaud soumettait ses manuscrits à divers éditeurs.

  Homonymes, doubles, clones... Mon quotidien en a encore été imprégné avec la réception le 28 d'un courrier de Kerbellec. Le grand Phi poursuit depuis plus de 30 ans ses études rousseliennes, avec une nouvelle publication en approche.
  Il me communiquait une récente trouvaille. La première oeuvre publiée de Roussel, âgé de 20 ans, a été en 1897 La doublure, roman en vers (5586 alexandrins, texte complet ici), qu'il voyait lui apporter aussitôt la gloire. Mais le seul critique qui daigna en dire un mot fut pour l'éreinter.
  C'est de plus l'histoire d'un comédien, Gaspard Lenoir, doublure du célèbre acteur Litert, qui tente de mettre à profit un congé de Litert pour révéler son talent, mais sa prestation provoque les quolibets du public.

  Il est compréhensible que ce livre "vraiment fort ennuyeux", selon le mot du critique, soit passé inaperçu, malgré (ou à cause de) ses hardiesses. Roussel s'est attaché à composer des vers fort peu poétiques, afin que son texte ressemble à de la prose, ce qui est renforcé par une grande quantité de vers blancs (rimant sur deux sections de l'oeuvre) et d'enjambements. Le comble est que Roussel y a introduit des répliques de la pièce en prose que joue Gaspard, données sur trois vers, sans rimes ni mètre identifiable grâce aux enjambements, et que Gaspard entend, à la différence de Litert, scander ces répliques comme des vers...
                                                       Comme
Toujours, il s'était mis à l'avance au travail
Avec ardeur, cherchant jusqu'au moindre détail,
Chaque intonation de voix et chaque pose,
En tachant de donner au dialogue en prose,
L'enflure et la rondeur emphatique des vers.
Puis il avait joué, tout à fait à l'envers
De Litert (...)
  Kerbellec, après 30 ans de scrutation du texte, a enfin vu que "à l'envers de Litert" était équivalent à "au verso Litert", aux vers solitaires, description d'un des aspects de ce roman en vers.
  Si ce point trouve sa place ici, c'est que l'envoi de Philippe m'est arrivé le lendemain du jour où j'ai appris que H.E. Huntley aurait été une signature de Ernest Huntley Hart, de même que EHH, or
ERNEST HUNTLEY HART = 233, 13e terme de la suite de Fibonacci, et
EHH = 21, 8e terme de la suite de Fibonacci, 8 et 13 appartenant aussi à cette suite.
  S'il s'agit de l'auteur de la seconde partie du Points Sciences,
LA DIVINE PROPORTION = 232, or les nombres différant d'une unité d'un Fibo peuvent être exprimés par une relation fibonacienne, celle-ci dans le cas où le Fibo est de rang impair:
Fn - 1 = Fn-5(Fn-5 + Fn-4) ou 232 = 8(8+21)
  J'avais vu ce 232 pouvoir être l'oeuvre d'un 233, or l'expression clé "à l'envers de Litert" chevauche les vers 232 et 233 de La doublure.

  De Litert se trouve "rimer" avec un autre enjambement que Kerbellec a vu essentiel, Alibert, 54 vers plus loin. Gaspard, après son four, rentre chez lui où l'attend son amante Roberte de Blou,
           dans sa chambre étroite de la rue
Alibert.

             C'est un an avant, l'hiver dernier,
Qu'un soir elle l'a vu faire un palefrenier,
Doublant aussi Litert (...)
  Les deux amants vont mettre à profit l'échec de Gaspard pour faire une folie, prendre le train pour Nice et suivre le carnaval. Leur itinéraire minutieusement décrit par Roussel passe par une rue dont le nom est omis, mais aisément identifiable, la rue Alberti, anagramme d'Alibert.
  Ce qui m'importe ici est la fin du vers, l'hiver dernier, écho immédiat au Dernier Hyver de Papillon.

  J'ai cherché en commençant ce 241e billet un titre de valeur 241, comportant "Perec" et "escalier(s)", et je suis parvenu à
Perec serait dans l'escalier.
  Ce n'est qu'au cours de sa rédaction que j'ai trouvé la valeur correspondant au premier chapitre de la VME,
Dans l'escalier, 1 = 123 = Georges Perec,
et j'aurais été bien en peine d'énoncer ce titre lorsque j'ai choisi le mien. Je ne me souviens pas avoir jamais remarqué l'anomalie concernant les trois premiers titres des chapitres Escaliers
  Je remarque encore
241 = Georges Perec double double = Georges Perec Bartlebooth.
  Mon 123e billet, Puzzle échevelé, concernait aussi Perec et Roussel.

Note: un lecteur me signale:
LE PUZZLE = 123
et j'ajoute pour ma part qu'une des contraintes de la VME est la triple diagonale du compendium, ce qu'on nomme savamment
BATHMOSTICHE = 123,
par ailleurs Perec est connu pour ses palindromes, et le plus long mot palindrome français est
RESSASSER = 123.


1 commentaire:

Victor TENNGU a dit…

1,2,3 = A,B,C donc. L'Abaissé dont Khaitzine parle dans son "Le Cabaret du Chat Noir" https://books.google.fr/books?id=171wDwAAQBAJ&pg=PT26&lpg=PT26&dq=fraternite+de+l%27abc+khaitzine&source=bl&ots=v_ccjMSyS4&sig=ACfU3U32wEkQGJr-G9FnjKWBG8UgJrw_Tg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjAhK-dtpjiAhUH1eAKHfGuDhQQ6AEwEXoECAcQAQ#v=onepage&q=fraternite%20de%20l'abc%20khaitzine&f=false

Autre source https://le-mot-juste-en-anglais.typepad.com/files/hugo-shakespeare-et-lenseignement-des-langues-vivantes-1.pdf : "Ce recours symbolique à l’alphabet est en fait assez répandu dans l’œuvre de Victor Hugo. Dans Les Misérables, par exemple, les Thénardier présentent un contre-exemple de cette foi hugolienne dans le pouvoir rédempteur de
l’alphabet. Ils pensent, eux, qu’il est impossible de sortir de leur misère par le
seul moyen de l’instruction. Les compagnons d’Enjolras se persuadent que seule la révolution peut les sauver, prenant comme dénomination de leur groupe “la société des amis de l’ABC.” Mais, en quoi consiste cette société-là ? Au dire de Hugo, c’était “une société ayant pour but, en apparence l’éducation des enfants, [mais] en réalité le redressement des hommes. On se déclarait les amis de l’ABC. L’Abaissé, c’est le peuple”. Il n’ en reste pas moins que l’alphabétisation – ce mot si riche et quasiment intraduisible en anglais – demeurait l’unique issue de leur condition; c’est elle seule qui donne “une conscience au peuple et le constituait en tant que tel”. Aussi dans sa correspondance : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Victor_Hugo/1862

D'ailleurs "Fraternité des Amis de l'ABC" = 213

Un rapport avec l'Abbé C. de Georges Bataille ?