4.4.13

Halterophilie

pour Alan T.

  Les développements concernant Jack l'Eventreur dans l'oeuvre de Paul Halter étaient tels que je les ai éludés dans mon dernier billet, Ripperomanie (qui est d'ailleurs le titre d'une nouvelle de Halter, dans La nuit du loup).
  Un hasard a voulu que mes publications sur Quaternité les 3 premiers mois de cette année totalisent 1-2-3 billets, ce qui m'a donné l'idée de publier 4 billets en avril, et pourquoi pas les 1-2-3-4 avril ? Il m'avait déjà semblé en  février que le 3 avril serait un bon jour pour évoquer Jack, cette date étant donnée comme inspiratrice pour l'Eventreur de Boris Akounine.
  Une actualité gidouillante m'a conduit à La spirale d'or de Theodore Sturgeon, et j'ai appris en écrivant le billet du 1er avril que c'était jadis la Saint-Théodore. La suite du 2 avril consacrée à la double spirale de l'ADN m'a fait découvrir que l'article original de Watson-Crick était daté du 2 avril 1953 (et son 60e anniversaire a été exploité pour la mise en vente d'une lettre de Francis Crick, adjugée à 6 M$).
  Sans en avoir été conscient, ces billets de commençant avril associent un sturgeon (esturgeon) à un surgeon (anglais "chirurgien", et il est supposé que Jack ait eu des connaissances en chirurgie).
  Il m'a semblé qu'il serait indiqué d'étudier ici les 4 premiers romans de Halter parus au Masque, de 1987 à 1989, et de dire un mot de son premier roman de 1986, qui a failli remporter le prix de Cognac mais qui a dû laisser la place au premier Fred Vargas, pourtant fort ennuyeux (on va pardonner puisque sans ce prix Fred n'aurait peut-être pas persévéré, tandis que Paul a été récompensé l'an suivant, pour un roman plus achevé).
  Le premier Halter publié a donc été La quatrième porte, qui m'a alors profondément impressionné. Il est structuré en 5 parties, les deux premières se présentant comme le récit du jeune James Stevens (nom peut-être emprunté à Ted Stevens, narrateur de La chambre ardente) : 5 morts étranges se sont produites dans l'entourage immédiat de son ami Henry White, jeune émule de Houdini.
  La 3e partie fait place à un nouveau narrateur, l'écrivain John Carter (allusion à John Dickson Carr alias Carter Dickson), pas si nouveau en fait car le lecteur apprend que ce qu'il a lu précédemment est une fiction, un défi présenté en 1979 au docteur Twist, lequel s'était vanté de pouvoir donner une solution rationnelle à n'importe quelle énigme, aussi tordue fût-elle (Jacques Futrelle avait proposé la même chose à sa femme May, voir Mystère-Magazine n° 72).
  La 4e partie est la fin imaginée par Twist, en 3 chapitres, montrant l'implication de Henry White dans 3 des 5 morts, en partie pour des motifs louables, mais Twist le voit finalement perdre toute mesure, se  prendre pour Houdini réincarné, et laisser mourir son propre père pour créer une apparence de crime impossible.
  5e partie ou épilogue : Carter est émerveillé des solutions données par Twist, mais celui-ci rétorque que ce qu'a cru inventer Carter est en fait une affaire réelle qui s'est passée en 1951. Toutefois les vrais détails n'en ont pas été rendus publics, alors comment Carter les a-t-il connus ? Peut-être est-il James Stevens, car Carter a été trouvé amnésique au Canada en 1953, et il ignore tout de sa vie antérieure (oui, l'amnésie c'est un peu facile). A moins que ce ne soit son ami Jimmy (James ?), un alcoolique qu'il subventionne charitablement pour lui fournir des idées, et après il ne sait plus très bien d'où vient ce qu'il écrit... Justement Jimmy s'est enfui juste après avoir lu la conclusion de Twist.
  Mais Twist s'est procuré des photos des protagonistes de 1951, et on découvre que Carter est en fait Henry White, qu'on pensait noyé dans la Tamise.

  Un roman qui débute par un roman, ce n'est pas tout à fait neuf, et je pense illico à "53 jours" de Perec, qui débute par une 1e partie 53 jours (en 13 chapitres comme le récit de La quatrième porte), puis le lecteur apprend dans la 2e partie que ce qu'il vient de lire était un manuscrit de l'écrivain Robert Serval, pouvant contenir des indices sur sa disparition. Mais ce roman inachevé n'est paru qu'en 1989.
  Il y a encore Travail soigné, le premier roman de Pierre Lemaitre, qui obtiendra le prix Cognac en 2006, 19 ans après Halter.
  Dans le domaine des narrations trompeuses, on peut évidemment penser à ce qui fut le n° 1 du Masque en 1927, Le meurtre de Roger Ackroyd, 60 ans plus tôt.

  La quatrième porte laisse des énigmes non résolues. Jimmy était-il bien James ? Sa fuite après avoir appris que Henry était un triple tueur le donne à penser, mais alors que faisait-il dans l'intimité de l'amnésique ? A-t-il joué un rôle dans le défi proposé à Twist ?
  S'il est presque toujours appelé Jimmy, son nom Lessing est aussi mentionné, et un alcoolique Lessing dans un récit métatextuel accumulant 4 meurtres ne peut qu'évoquer à un spécialiste de cette littérature La bibliothèque de Villers (1980), où Benoit Peeters avait imaginé 4 meurtres aux 4 sommets du carré formé par la ville de Villers, avec 4 victimes dont les noms donnaient l'acrostiche IVRE. Le narrateur soupçonne le bibliothécaire Lessing, mais celui-ci est à son tour trouvé assassiné, au centre du carré.
  C'est au lecteur qu'il incombe de trouver la solution, le coupable est le LIVRE. Un hasard m'a fait découvrir ce "livre" dans une braderie, lors de la signature au Salon du Livre 2001 de Sous les pans du bizarre, où j'avais imaginé 4 morts de latinistes aux sommets d'un rectangle de Pythagore 3x4, inspirées par les cousins York aux 4 coins de York Square dans L'adversaire de Dannay-Sturgeon.

  Je me suis précipité en juin 1988 sur le second Halter publié, Le brouillard rouge, mais ai été un peu déçu.
  C'est encore un récit à la première personne, celui du jeune inspecteur John Reed, espoir de Scotland Yard. Dans une première partie, il est envoyé à Blackfield en 1887 pour y résoudre un meurtre vieux de 9 ans. Il y parvient, mais tait ses résultats, la coupable étant la jolie Cora dont il est tombé amoureux.
  Seconde partie : John Reed est confronté en 1888 aux meurtres de prostituées à Whitechapel, et découvre que Cora est devenue l'une d'entre elles. Le récit exploite habilement les morts non imputées à Jack, dont John ne peut être responsable, mais son emploi du temps lors des crimes canoniques est éludé.
  Le récit contient néanmoins des indices, et le dernier chapitre révèle qu'il s'agit d'une confession que le supérieur de John Reed lui a ordonné d'écrire, avant de mettre un terme définitif aux exploits de Jack Ripper.
  Il subsiste néanmoins des énigmes, ainsi le récit insiste à maintes reprises sur l'incroyable invisibilité de l'Eventreur, qui peut commettre ses crimes dans un quartier pourtant sillonné par la police. John attribue l'essentiel de cette invisibilité à sa qualité de policier, et achève par une pirouette éludant l'éventualité d'un stratagème d'une diabolique ingéniosité :
S'il existait effectivement, pensez-vous sincèrement que Jack l'Eventreur vous livrerait son secret ? Pour que quelqu'un d'autre puisse l'utiliser ?
  Ceci me rappelle la chute du Trou de mémoire, la nouvelle de Barry Perowne associée pour moi à une fabuleuse coïncidence.

  Page 203, après réception de la lettre signée "Jack l'Eventreur", le chef de John lance l'idée Jack L'Eventreur... ou Jill l'Eventreuse!, vivement repoussée par John. Ce féminin Jill (diminutif de Jane tandis que Jack est celui de John) n'est pas une initiative de Halter, mais il était loin d'être obligatoire de le trouver dans ce roman célébrant le centenaire des exploits de Jack, alors qu'il venait de paraître fin 1987 Jill rips ("Jill éventre") de David Lindsay, où c'est une Jill qui signe en 1988 à Glasgow une série de meurtres de macs.
  Je n'ai pas lu le roman, mais ai vu le film qui en a été tiré en 2000, où l'action a été déplacée à Boston en 1977. Je ne sais si les noms des protagonistes originaux ont été respectés, mais dans le film la réelle identité de Jill est Irene Reed !
  Elle est la fille d'une prostituée, Annette Vernon, adoptée par les Reed de New York après la mort de sa mère dans d'atroces conditions, et elle est revenue à Boston pour la venger. Dans le roman de Halter, John Reed est aussi le fils d'une prostituée, associée à une scène occultée de son enfance, lorsque elle est venue un soir réclamer son fils chez son père, dans une pièce où une lampe à pétrole diffuse une clarté pourpre, le "brouillard rouge" donnant son titre au roman. C'est la déchéance de sa bien-aimée Cora qui a enclenché le parcours sanglant de John.
  Reed est un nom courant, qui ressemble à red, "rouge", et on pourrait faire appel à une certaine part de communauté d'intention dans le choix du même nom pour l'Eventreur ou l'Eventreuse. Irene Reed commet ses meurtres vêtue d'une combinaison de vinyl rouge. Le seul détail que j'ai déniché concernant le roman original est qu'il se passe dans le red light district de Glasgow.

  Jill rips : "elle" rips plutôt que "il", "la" plutôt que "le" chirurgien. Ceci m'amène à une forme "la (surgeon) rips" qui ferait un lien inespéré avec la Spirale d'or de Sturgeon, d'autant que le dernier roman de Halter se nomme précisément Spiral.
  C'est un roman pour la jeunesse paru en avril dernier, parallèlement à la superbe enquête de Twist au Masque, Le voyageur du passé. J'espérais une coïncidence "4 avril" pour ce billet, en voici une petite avec un commentaire tardif de ce 4 avril sur Spiral. Ici une critique plus détaillée par Paul Maugendre, n° 442 de l'association 813.

  Ceci ouvre de telles perspectives qu'un vertige me saisit, le "brouillard rouge" n'est pas loin. J'évoquais dans le billet du 2 avril l'écho que m'inspirait dans La spirale d'or la succession cloud-Carl, envisagée dans le billet du 8 septembre 2011, suite à une trouvaille de Eliyahu Rips, le découvreur du "code biblique". Or Michael Drosnin, qui a donné à ce code une dimension sensationnaliste, remarque dans son second ouvrage que le nom de RIPS apparaît presque directement dans la Bible avec son renversement SPIR, "saphir".
  Le saphir est particulièrement associé à Dieu, et le trône divin que décrit Ezéchiel (Ez 1,26) à l'apparence de la "pierre de saphir", ABN SPIR, que Drosnin renverse en RIPS NBA, "Rips prophétise".
  De quoi "dé-spirer" Pierre pour éventrer Paul (mais pas tout de suite, car j'espère voir Halter poursuivre son oeuvre encore longtemps).

  Ce billet du 8 septembre était immédiatement précédé d'un billet du 31 août, car ces dates étaient significatives pour moi avant que je prenne conscience qu'elles étaient aussi celles des premiers meurtres de Jack. J'ai de même publié des billets à ces dates en 2010 et 2012, mais il y a un écho particulièrement immédiat dans le billet du 31/8/11 illustré du tableau de Burne-Jones L'escalier d'or. Ne s'agit-il pas d'une spirale ? une spirale d'or ! Alors que le titre du dernier Halter se réfère précisément à un escalier en spirale

 IRENE/REED = 51/32 se trouve être un nom doré. Je rappelle que cette propriété n'est pas rarissime (1 cas sur 35), mais le cas est particulier car 51/32 correspond aussi à MICHAEL/CAINE, dont il était question dans le dernier billet, alors que je n'avais pas encore vu Jill rips.
  Michael Caine y était présent parce qu'il était au moins doublement lié à Jack, pour avoir refusé un rôle de psychopathe londonien dans Frenzy de Hitchcock (1972) et accepté celui de l'inspecteur Abberline dans le Jack l'Eventreur du centenaire (1988), selon un curieux chassé-croisé avec Barry Foster, mais les rôles doubles de l'acteur ne se limitent pas à cela.
  Ayant très mal pris le refus de Caine, Hitchcock a-t-il digéré de le voir accepter en 1980 le rôle guère plus reluisant du psy Robert Elliott chez Brian de Palma ? Hitch est mort le 29 avril 1980. Dans Pulsions, Robert se dédouble en Bobbi, terrifiante manieuse du rasoir. Elliott rips, pourrait-on résumer, et je rappelle que certains assimilent Elliott à Elie, en hébreu Eliyahu, prénom de Rips.
  Je rappelle que je relie Jung/Haemmerli aux patriarches Elie/Enoch, les "non-morts" de l'Ancien Testament. Il existe un autre Enoch au début de la Bible, fils de Cain (Gn 4,17).
  Caine a également joué Jekyll & Hyde dans le téléfilm éponyme (1990). C'est l'occasion d'évoquer le brillant Elémentaire, mon cher Holmes, de Albert Davidson (alias René Reouven, alias René Sussan). Il y est imaginé une autre version de l'oeuvre de Stevenson, si maléfique que tous ceux qui l'ont lue sont devenus des tueurs sanguinaires, parmi eux bien sûr le brave Jack.
  Et bien sûr, Caine a eu le privilège de jouer les deux rôles de Sleuth (Le limier) à 35 ans de distance, en 1972 et 2007 (ce que j'évoquais dans le billet Paul & Fred).

  J'abandonne avant que la tornade Caine ne m'emporte sans espoir de retour, et je reviens à Halter pour constater que ses deux premiers romans publiés se présentent tous deux comme des textes de commande, écrits à la première personne par un assassin amnésique. Certes John Reed sait qu'il est l'Eventreur, mais il a occulté l'assassinat de sa mère dans sa jeunesse. Quant aux 13 premiers chapitres de La quatrième porte, dont le narrateur allégué est James, on apprend finalement qu'ils étaient écrits par Henry.
  Le premier Halter (de 1986 mais publié en 1995) offre un schéma très proche. La malédiction de Barberousse est écrit à la première personne par Etienne Martin, lequel demande à Twist de venir en Alsace élucider un crime impossible commis 12 ans plus tôt, or c'est Etienne le coupable, mais il avait occulté le forfait.

  La série se clôt sur Le brouillard rouge, et le roman suivant adopte une narration impersonnelle. Le premier chapitre de La mort vous invite, se passant dans les années 50, est intitulé Où l'on parle de Jack l'Eventreur : à propos de l'affaire récente du Tueur de dames seules, qui va s'avérer liée à la présente enquête, Alan Twist évoque sa récente découverte dans les papiers de son père d'un manuscrit donnant l'incroyable solution de l'affaire Jack; une note propose au lecteur de se reporter au Brouillard rouge.
  L'auteur londonien Harold Vickers invite un policier et un journaliste à un dîner où il leur fera des révélations fracassantes, mais lorsqu'ils arrivent chez l'écrivain, sa porte est fermée au verrou de l'intérieur; après l'avoir enfoncée, ils le découvrent mort à sa table, chargée de plats encore fumants, et l'autopsie révèle qu'il est mort la veille ! On apprend que l'écrivain travaillait à un nouveau projet, La mort vous invite, s'ouvrant sur le même mystère, avec son plus intrigant détail, un verre empli d'eau sous la fenêtre...
  Les débuts de l'enquête épaississent encore l'énigme. La même situation s'est présentée quelque 20 ans plus tôt, avec la mort de Charles Fielder dans le salon particulier d'un restaurant. Par ailleurs le père de Harold, Théodore qui désapprouvait la profession de son fils, était mort quelques années plus tôt à la suite d'un AVC survenu pendant un repas. Avant de mourir, il avait prophétisé que Harold mourrait lui-même à table s'il persistait dans l'écriture de polars, et divers indices pourraient faire penser que Théodore est sorti de sa tombe du cimetière proche pour exécuter sa prophétie...

  Ces Charles-Théodore unis par une mort similaire m'évoquent le cas Carl-Theodor, Jung-Haemmerli, et j'avais omis dans mes commentaires sur The Golden Helix de Theodore Sturgeon que la revue de 1954 contenait aussi une nouvelle de Charles Stearns, The Wall, et une nouvelle d'un autre Theodore, où le dernier humain meurt au cours d'un dîner avec une androïde...

  Je rappelle que, dans L'adversaire de Dannay-Sturgeon, il semble qu'un Nathaniel, équivalent hébreu de Théodore, soit revenu de l'autre monde pour exécuter ses cousins.

  Harold Vickers a beaucoup vu récemment un voisin, Colin Hubbard. Hurst et Twist vont l'interroger, et Hubbard leur dit que lui et Vickers se voyaient pour discuter de leur passion commune, les romans policiers.
  Twist a recours à un piège grossier en lui demandant s'il apprécie l'un des chefs-d'oeuvre du genre, Le Mystère de la chambre jaune de Conan Doyle, bourde inimaginable pour tout connaisseur...
...mais j'ai eu la surprise de découvrir ceci en septembre dernier, comme si l'éditeur était tombé à son tour dans le piège de Twist. Son site indique "le produit actuellement indisponible", et on peut penser que l'énormité ne sera pas reproduite sur une éventuelle réimpression (mais j'ai un exemplaire témoin).

  Vickers avait parlé à Hubbard de l'attaque survenue à son père Théodore pendant un repas, ce qui avait amené Hubbard à détailler le cas de Charles Fielder, donnant l'idée à Vickers de son prochain roman. Curieusement, ce cas Charles, survenu 20 ans plus tôt, est daté de 1907, alors que la mort de Théodore, il y a quelques années, est arrivée en 1952.
  Sans essayer de démêler cette impossibilité, je remarque que 1907 est précisément l'année de parution du Mystère de la chambre jaune (en feuilleton du 7 septembre au 30 novembre), et je rapproche ceci d'une bévue incontestable du Brouillard rouge, où une éventuelle victime de Jack, Emma Smith, est dite avoir été trouvée agonisante le lundi de Pâques 1888, le 13 avril (chapitre 18).
  Or Pâques était le 1er avril en 1888, et Emma Smith, agressée dans la nuit du 2 au 3, a été découverte le matin du mardi 3 (elle est morte le 4). Le 13 avril m'est évocateur car le tueur du Mystère de la chambre jaune trouve la mort dans sa suite, Le Parfum de la dame en noir, le soir du 13 avril 1895, dans la nuit de Pâques. C'est le premier polar couvrant exactement une Semaine sainte que j'ai découvert, en avril 1997, le cinquième et dernier ayant été en octobre 2008 Le décorateur, où Boris Akounine fait mourir Jack l'Eventreur le soir du 20 avril 1889, dans la nuit de Pâques (et naissance de "Dolph" Hitler).

  Le Halter suivant, La mort derrière les rideaux, a plusieurs points communs avec La  mort vous invite : enquête de Twist sur un crime impossible dans une demeure londonienne, répétition exacte d'un crime antérieur, et le criminel est par ailleurs aussi responsable d'une série de meurtres de femmes.
  Je ne déflore pas plus cette belle intrigue aux multiples rebondissements. Je me suis abstenu jusqu'ici d'explorer les pistes numériques que je n'ai pas manqué de suivre, ainsi ces 4 Halter ont dans la collection Le Masque les numéros 1878-1922-1931-1967, somme 7698 se décomposant en 2.3.1283.
  Chaque livre a par ailleurs un numéro d'éditeur, celui du 4e Halter étant 3821, nombre premier que j'ai aussitôt remarqué être le renversement de 1283. Ceci m'est aussitôt évocateur de mes recherches sur BACH, 2-1-3-8, dont un volet concerne les nombres 21-38 correspondant à BA-CH, où mon plus beau résultat est le 1er Prélude-Fugue du Clavier bien tempéré, 1283 notes débutant par le fameux arpège CEGCEGCE = 38, s'achevant par l'accord CCEGC = 21.
  Je conçois qu'on puisse juger de tels calculs totalement vains, et je n'entends pas les justifier. C'est cependant cette obsession intime qui m'a fait découvrir le Décorateur de Boris Akounine, à partir du 4e roman pascal découvert début octobre 2008, Les 4 coins de la nuit, de Craig Holden. Ce n'était pas seulement un roman couvrant exactement la Semaine sainte, mais aussi un texte en 38 chapitres d'un auteur d'initiales CH, ce qui m'a donné l'idée de chercher si un auteur BA n'aurait pas écrit un texte de 21 chapitres, et conduit à Akounine dont je n'avais jamais été tenté d'ouvrir un livre.

  Il est possible de subdiviser les 18 chapitres de La quatrième porte en 13-5, selon la première rupture diégétique détaillée plus haut. Ceci me rappelle le poème 18 de Paul Braffort vu dans le billet précédent, consacré à Jack l'Eventreur, où une contrainte imposait un 5-13 riche en échos pour moi. Pour aller un peu plus loin, j'ai vu jadis ce rapport 5/13 pouvoir relier deux modèles symboliques quaternaires,
la "psycogonie" de Platon, soit les séries bâties sur les puissances de 2 et 3 :
1-2-4-8 = 15
(1)-3-9-27 = 39
et la double Tétraktys de Pythagore :
1-2-3-4 = 10
5-6-7-8 = 26
  Dans les deux cas, 15/39 = 10/26 = 5/13.
  10/26 s'est rappelé récemment à mon souvenir avec l'épisode 10 de la série 2 de Touch, diffusé le 5 avril aux USA. L'enfant prodige Jake, pour lequel le monde est une spirale de nombres, perçoit le nombre 1026 qui va permettre d'éliminer définitivement le "tueur de Justes", celui qui avait entrepris de tuer les 36 Justes, dont Jake. Ce nombre 10/26 est la date de naissance de Jake, né le 26 octobre 2000, mentionnée dès le premier plan du pilote, et je me demande si les scénaristes avaient alors en tête 10+26 = 36, et plus particulièrement la double Tétraktys (qui a sa contrepartie hébraïque, avec Y=10 et YHWH = 26). Wikipedia m'a appris que le début de la seconde saison était originellement prévu le 10/26/2012 :
The second season was originally scheduled to begin Friday, October 26, 2012 but was pushed back to Friday, February 8, 2013.
  10-26 m'invite à compléter en la quadruple tétrade vue avec le carré de Dürer, 10-26-42-58, avec (10+42)/(26+58) = 52/84 = Jung/Haemmerli.
  Je consulte souvent Merveilleux nombres premiers, de JP Delahaye, et je viens de le faire pour vérifier que 1283 et 3821 étaient premiers (soient les 208e et 530e).
  Je remarque la spirale de Ulam en couverture (ci-dessus), disposition de la suite des entiers qui fait apparaître d'intrigantes diagonales de nombres premiers (ci-contre en blanc dans le carré des 45x45 entiers de 1 à 2025).
  Sur le livre de Delahaye la spirale a été limitée à un carré de 4x4, avec pour le 16e nombre un symbole signifiant que la spirale est infinie, mais ceci m'évoque aussitôt (peut-être est-ce voulu) le jeu de taquin auquel a été consacré mon billet du 8 septembre 2012 (ou 1er Absolu 140, ou 124e anniversaire du meurtre d'Annie Chapman), Taquin tree (anagramme de Quaternité).

  J'ai un autre livre, La spirale mystique, que je consulte bien moins souvent. Je le sors et redécouvre qu'il est écrit par une Jill, Jill Purce (qui a ensuite épousé Rupert Sheldrake).
  Jill rips, mais cette Jill spires, et je découvre à la page 77 de son livre L'échelle de Jacob, de William Blake, qui fort probablement a in-spiré L'escalier d'or de Burne-Jones.
  Dans Touch, Jake est le diminutif de Jacob.

Note du 29 avril : Il m'est revenu qu'un autre roman où la narration se révèle tardivement une fiction est Borges et les orangs-outangs éternels, de L. Verissimo, avec un degré parodique tel qu'il est difficile de croire au récit. Je remarquais ici une belle coïncidence avec La bibliothèque de Villers, où la série de 5 morts dessine les séquences IVREA pour les prénoms et IVREL pour les noms, tandis qu'un même indice mène à 5 coupables chez L. Verissimo : selon les deux premières hypothèses, X mène à Xavier, O à Oliver, dont les lettres complémentaires sont les anagrammes des séquences IVREA et IVREL.
  Or ce récit est comme La quatrième porte un problème posé à un expert en déduction, en l'occurrence Borges, qui découvre que le coupable du meurtre est le narrateur du récit.

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