4.4.11

...Sloty 1959

Et voici donc quelques développements inspirés par L'insolite aventure de Marina Sloty, qu'il vaut mieux aborder après avoir lu Marina 1870.
Qu'il soit bien clair qu'ils ne constituent pas à mon sens une exégèse du roman, mais un faisceau d'éléments plus ou moins convergents qui "donnent à penser"...

Il faut d'abord préciser que le récit abonde en dates diverses. Je crois avoir établi que certaines de ces dates étaient très subtilement choisies par de Warren, en-dehors de la coïncidence phénoménale observée pour la valeur numérique de Marina Sloty :
56 + 91 = 147, ou multipliés par 7, les termes 8-13-21 de la suite de Fibonacci, dont le rapport de deux termes tend vers le nombre d'or, alors que sloty signifie "or" en polonais (orthographe courante de zloty).
Les deux années entre lesquelles les expériences atomiques du Larzac ouvrent un couloir temporel permettent d'accéder aux trois termes suivants de la suite de Fibonacci :
1870 = 34 x 55
1959 = 34 x 55 + 89
Ceci suggère d'examiner attentivement les dates des expériences, d'abord prévues pour les 3/2, 7/3, 4/4, et 5/5 à 22 heures. Marina ignorait tout de ces expériences lors de son saut le 7 mars en 1870, la laissant dans une totale incompréhension jusqu'à ce qu'elle regarde un journal du 21 janvier emporté par hasard (!), ce qui va lui permettre de regagner 1959 le 4 avril suivant :
du 21/1 au 7/3 il y a 45 jours;
du 7/3 au 4/4 il y a 28 jours.
45 et 28 sont des entiers en rapport d'or optimal, et leur somme 73 évoque la date du 7/3 pivot de ces 73 jours. Certains jugeront cette homologation puérile, elle fut en tout cas fondatrice pour Perec, natif du 7 mars, dans l'oeuvre duquel cette date revient constamment sous les formes 73 ou 37.
L'expérience du 5/5 est annulée et reportée au 22/8, 140 jours après le 4/4. Marina y effectuera son second saut temporel volontaire, or 140 c'est 5 x 28, et il y a dans une année 365 jours = 5 x 73, permettant donc un autre rapport 140/225 = 28/45 (= 0.622 contre 0.618 rapport d'or). Incidemment, j'ai rencontré chez Perec une possibilité mettant parallèlement en jeu 5 nombres de somme 365, parmi lesquels 73. Autre curiosité : en 1870 la lettre W était considérée comme étrangère, "ne faisant pas une lettre de plus dans notre alphabet" (Littré). En conséquence Y était la "24e lettre de l'alphabet" (toujours Littré), et les numérologues français de l'époque utilisaient un alphabet de 25 lettres, où MARINA / SLOTY = 56/90 = 28/45 encore. Incidemment encore, ceci a eu un écho dans mes recherches bachiennes qui ont en retour suscité un autre écho dans l'oeuvre de de Warren...

Les quantièmes des mois successifs d'abord concernés, 3-7-4-5, peuvent également construire un rapport 73/45; Marina apprend rétrospectivement, le 26 mars, les expériences du 7/3 et du 3/2 (32 jours avant le 7/3).
Ce programme initial couvre exactement 91 jours, valeur de SLOTY. Le partage doré entier de 91 en 56 (MARINA) et 35 tombe le 31 mars, 22 heures, or c'est le soir du 31 mars que Marina rédige le récit de son aventure, à l'intention de Dominique, auquel elle a révélé l'après-midi même son immatérialité. Il est précisé que malgré l'heure tardive elle porte les 28 feuillets chez Dominique, et que la nuit qui s'ensuit est pour lui une longue nuit d'insomnie.
En calculant exactement la section d'or des 91 jours du 3/2 au 5/5, sans arrondir aux plus proches entiers 56 et 35, on tombe au 1er avril vers 5 h du matin, au cours de cette seule nuit blanche mentionnée pour Dominique.
A remarquer aussi que minuit de cette date, à cheval entre mars et avril, découpe la période fatidique en pratiquement 56 jours en février-mars, et 35 jours en avril-mai.
Plus précisément, 25 jours en février et 31 jours en mars, dont les chiffres permettent de construire le rapport 21/35 (= 3/5), précédant les rapports 35/56 et 56/91 (5/8 et 8/13) de la suite de Fibonacci multipliée par 7 (7-7-14-21-35-...)
Ceci m'a conduit à calculer les valeurs de MARS et FEVRIER, 51 et 83, soit les nombres mêmes que j'ai vu structurer l'alphabet, et plus particulièrement le recueil Alphabets de Perec. Il y avait deux dates obsessionnelles pour Perec, sa naissance le 7 mars 1936, la déportation de sa mère le 11 février 43, dont les éléments balisent son oeuvre, ainsi les 1936 "vers" de 11 lettres d'Alphabets ont-ils probablement à voir avec ces deux dates, mais il n'est pas de son fait que les 10 lettres les plus fréquentes en français, AEIOULNRST présentes dans chaque vers, se partagent en
5 voyelles AEIOU = 51 = MARS,
5 consonnes LNRST = 83 = FEVRIER.
Le nombre précédent dans cette suite 51-83-134 est 32, or 32 jours séparent les 2 premières expériences, à cheval sur février-mars, du 3/2 au 7/3.

Peut-être plus pertinemment en ce qui concerne les intentions de l'auteur, les 91 jours originellement prévus correspondent à un quart d'année, une saison, et le 3 février initial est la Saint-Blaise, date traditionnellement associée au milieu de l'hiver.
Considérer les demi-saisons au niveau gématrique amène quelques surprises, ainsi les secondes syllabes de hi-ver et prin-temps sont dans le rapport doré de l'année :
VER / TEMPS = 45/73, en rappelant que ver signifie "printemps" en latin.
Par ailleurs ce TEMPS, mot particulièrement au centre du roman, est aussi une syllabe en double équilibre doré parmi les 8 syllabes formant les 4 saisons dans leur ordre usuel :
hi17 ver45 prin[119]57 [119]
temps[192]73 [73]
é525 au22 tomne67 [119]
[Ce texte de 24 lettres a une somme gématrique de 311.]
Le 73 dévoilé pourrait être un autre titre de ce roman débutant le 7/3... Et je ne m'offusquerais pas d'une nouvelle division de l'année en 5 saisons de 73 jours.

L'expérience du 5 mai a donc été annulée, et reportée au 22 août, 109 jours plus tard, un autre nombre qui m'est évocateur, que j'ai vu comme
NOMBRE DORÉ = 67 42, partage doré de 109 correspondant précisément aux deux jours fétichisés par Perec, le 11 février 42e jour de l'année et le 7 mars 67e jour d'une année bissextile comme 1936.
Ce report allonge la période initiale de 91 jours à 200, qu'un partage d'or entier découpe en 76-124, or c'est 76 jours après la première expérience du 3 février, le 20 avril, que se tient la réunion statuant sur le devenir des expériences.
Un calcul affiné livrerait pour la petite section d'or le 21 avril vers 7 heures du matin. Ce 21 avril à 15 h se tient une autre réunion examinant les conclusions des experts sur les preuves apportées par Marina.

Il faut lire le roman pour y trouver confirmation que peu d'autres dates de cette année 1870-1959 sont mentionnées, et surtout que celles intervenant directement dans le récit en-dehors de cette période de 200 jours sont le 21 janvier (1959), date du journal annonçant les expériences, 13 jours avant le 3/2, et le 11 septembre (1870), mariage de Dominique et Marina, 20 jours après le 22/8.
13+200+20 = 233, 13e terme de la suite de Fibonacci dont le 14e est 377, valeur du titre
L'INSOLITE AVENTURE DE MARINA SLOTY = 377
Le rapport à ce niveau donnent une excellente approximation de Φ (le nombre d'or) telle que la petite section d'or de 233 jours calculés à partir d'une même heure entre le 21 janvier et le 11 septembre tombe pratiquement à la même heure le 20 avril, 89 jours après le 21/1, 144 avant le 11/9.
Ainsi le roman dont le titre a pour valeur le nombre de Fibonacci excédant de peu le nombre de l'année, 365, permet-il de découvrir tous les termes précédents, 144-89-55-34-21-13-8, au sein de relations dorées. Les termes triviaux précédents peuvent être aisément trouvés, par exemple dans le programme orignal du 3/2 au 5/5.

Note du 3/9/177: relisant ce billet je remarque la date du début des expériences atomiques au Larzac, le 3 février. Or depuis j'ai lu Le labyrinthe de la rose, construit ad nauseam autour le nombre 34, et exploitant le fait que le 3 février est le 34e jour de l'année. Encore un Fibonacci immédiat présent dans le roman de Warren (et il est tentant de transformer la dernière date prévue, le 5/5, en 55 pour 34x55 = 1870).

Voilà à peu près tout ce que je vois pour l'heure dans ces dates, en restant à peu près dans le cadre du roman. Il m'éveille de multiples autres échos.
Ainsi cette dernière relation sur 233 jours peut s'énoncer sous la forme
13 + 220 = 13 + 4x55, cas particulier d'une relation quaternitaire valable dans toute suite additive, donnant l'équation générale
Fn+6 = Fn + 4Fn+3
qu'on retrouve dans la "suite d'or" (les puissances successives du nombre d'or forment aussi une suite additive), avec notamment :
Φ6 = 1 + 4Φ3
Je crois n'avoir jamais prêté attention à cette relation avant février dernier, où un hasard m'a mis en présence du découpage de 5888 en 328 + 5560, en lequel j'ai reconnu 328 + 4x1390, 328 et 1390 étant des termes d'une série additive qui m'avait particulièrement retenu.

Un autre formidable hasard m'a fait lire Les arcanes du chaos peu après Marina Sloty, et y découvrir le personnage de
James / Goatherd = 48/78 = 8/13, comme Marina/Sloty, ouvrant sur les ahurissantes relations données dans ce billet.
Je n'avais pas encore noté le parallèle entre les dénouements des deux romans. Goatherd est un être de l'ombre qui fomente en secret les événements clés gouvernant l'histoire humaine, et c'est ainsi qu'il organise une réunion entre le couple de héros du roman au sommet du World Trade Center, le matin du 11 septembre 2001.
C'est aussi un 11 septembre qui clôt L'étrange aventure, avec un mariage moins dramatique. J'ai eu la curiosité de calculer, et l'anglais livre
September-eleven = 103-63, partage doré idéal de la somme 166.

Mon renouveau d'intérêt récent pour de Warren m'a conduit aussi à découvrir sur sa fiche Wikipédia le nom du coauteur de sa dernière édition des Prétendants au trône de France, Aymon de Lestrange, que j'ai trouvé insolite sachant que La Bête de l'Apocalypse avait été publié dans la collection "l'étrange" qui n'a connu que 4 titres.
Le 3 mars, et peut-être ceci a-t-il en partie motivé ma relecture de Marina Sloty le lendemain, j'ai découvert la rare harmonie dorée de son nom :
AYMON / DELESTRANGE = 68/110 = 34/55, deux nombres de Fibonacci.
Une recherche sur ce nom montre que Aymon de Lestrange a écrit un article de musicologie en ligne ici, sur un rondeau de Solage, Fumeuse speculacion (!), dans lequel il envisage une architecture dorée du rondeau, ce qui me paraît dénoter une obsession personnelle car les nombres cités ne s'y prêtent guère à mon sens.

De Warren ne mentionne à ma connaissance la gématrie qu'à une seule occasion dans son oeuvre, dans Les portes de l'Enfer, où un retournement de l'histoire d'Israël est programmé le 2 novembre 1991, 43 ans exactement après sa création. Une note indique que 43 est la gématrie du Tétragramme YHWH en hébreu (selon la numérologie particulière de Raymond Abellio).
Perec était familier des jeux d'inversion des dates, ainsi sa naissance le 7 mars 1936 le fait jouer avec les nombres 73, 37, et même la date du 3 SEPTembre, naissance en 1836 de son double Hugo Vernier. Novembre, 11e mois, semble aussi avoir constitué une allusion au 11 février 43 (mort de Marguerite Winckler), comme 112 (page d'un livre laissé ouvert par un disparu), aussi est-il curieux de trouver deux 2/11, Jour des Morts, à 43 ans de distance, avec pour terme une année palindrome, multiple de 11 (ce qui est automatique pour tous les palindromes de 4 chiffres).
Le contexte de l'histoire d'Israël, et de son éventuelle disparition, est également évocateur.

Un nom doré apparaît dans le premier roman de de Warren, important car une intrigue amoureuse naît entre Laurence Féliciani, plus ou moins réincarnation de Lorenza Feliciani, compagne de Cagliostro, et
MICHEL DROUIN = 50 + 81, lui-même avatar d'un autre Michel.
LAURENCE FELICIANI = 79 + 68 = 147 n'est pas un nom doré, mais sa valeur totale 147 est aussi celle de MARINA SLOTY (56+91)
Cette identité numérique pourrait être rapprochée du fait que le réel grand-père de Marina serait Michel Sloty.
Incidemment, mes recherches sur la date du 14 avril 1895 (Pâques) présente dans Le parfum de la dame en noir comme dans Le triangle d'or m'ont mené à Dreyfus, dont le journal de sa "triste et épouvantable vie" débute le 14 avril 1895. D'autres échos m'ont fait m'intéresser de près à l'affaire Dreyfus, dont un spécialiste est un autre Michel Drouin. Lorsque je lui ai envoyé mon étude sur ces rapprochements, j'ai découvert qu'il habitait en face de l'Institut C.G. Jung.
Le pénultième billet m'avait fait mentionner Nicholas Brady = 81 50, personnage de Dick interprété à l'écran par Jonathan Scarfe = 82 51, autre nom doré. C'est à ma connaissance par l'expérience attribuée à Nicholas Brady dans Radio libre Albemuth que Dick a rendu compte le plus fidèlement de sa propre expérience spirituelle de février 1974, où il s'est vu au centre d'une averse d'étincelles colorées (a shower of brightly colored sparks), dessinant des milliers de tableaux abstraits, dans une vertigineuse accélération jusqu'à un calme total, la vision d'un paisible paysage nocturne identifié à la Crète antique, derrière un seuil rectangulaire aux proportions d'or. Il n'a pas osé franchir ce seuil spatio-temporel.

Chez de Warren apparaît un seuil temporel, au sommet de la crête dominant Sommelieu, nom en apparence banal que Google ne connaît cependant pas en-dehors de ce roman. Marina n'hésite pas à le franchir volontairement, le 4 avril puis le 22 août, 140 jours plus tard.
Peu de rapport avec le seuil de Dick, mais un troisième roman pourrait tisser un jeu d'échos entre Dick et de Warren, Le triangle d'or de Leblanc, au nom prédestiné... Sa première partie se nomme La pluie d'étincelles, étrange phénomène qui, dans la nuit du 3 au 4 avril 1915, nuit de Pâques non indiquée, conduit le capitaine Patrice Belval, amoureux de l'infirmière Coralie dont il ne sait rien, vers Passy, jusqu'à un hôtel particulier de la rue Raynouard. L'entrée principale en est gardée, et il est entouré d'un mur infranchissable. Patrice trouve une poterne dans une ruelle adjacente, et par un hasard pour le moins extraordinaire il en a sur lui la clé, reçue quelques heures plus tôt dans un mystérieux envoi anonyme...
Bref, comme Dick, Belval est guidé par une pluie d'étincelles jusqu'à une porte, mais lui n'hésite pas à la franchir, pour plonger dans de nouvelles fantasmagories. Ce domaine est celui où vit Coralie, mariée à l'infâme Essarès, et Patrice Belval va découvrir qu'un bon génie, Diodokis, s'est efforcé depuis 20 ans de le rapprocher de Coralie, pour ressusciter l'amour entre leurs parents respectifs, clos tragiquement le 14 avril 1895 où ils ont été assassinés par Essarès.
Dans un chapitre hallucinant, L'épouvante, rappelant La chute de la maison Usher, Patrice et Coralie tombent le 14 avril 1915 dans le même piège tendu à leurs père et mère 20 ans plus tôt, et le capitaine unijambiste Belval, utilisant une canne comme Larsan mort dans la nuit du même 14 avril 1895, peut-être en allusion au capitaine Dreyfus (drei Fuss, "trois pieds"), découvre sur les murs de leur prison le récit de l'agonie de son père, le Journal de son épouvantable vie du 14 avril 1895...
Et puis il y a le mystère du triangle d'or, donnant son titre au roman, titre de valeur 140, nombre de la série bleue du Modulor, précédé par 86 et 54 ( cette série d'or double la série rouge 27-43-70).
J'ai déjà indiqué que le climat ensorcelant de ce roman, malgré ses multiples invraisemblances, me semble avoir grandement influencé de Warren, et on comprendra que je réagisse aux 140 jours suivant le 4 avril dans Marina Sloty, sachant que l'analyse gématrique fournit
TRIANGLE + D'OR (LE) = 86 + 54 = 140
ESSARES = 86
BELVAL = 54
DIODOKIS = 86
Et l'étrange Diodokis cache d'abord le père Belval, supposé mort le 14 avril 1895, dimanche de Pâques, puis Essarès, supposé mort le 4 avril 1915, autre dimanche de Pâques...

Je suis bien conscient de la fragilité de ces correspondances entre Leblanc, Dick, de Warren, qui n'existent probablement que dans mon approche subjective, mais cette subjectivité c'est moi-même, qui pourrais me considérer comme un quatrième sommet de ce triangle.
Car bien avant d'avoir relié la pluie d'étincelles de Dick à celle de Leblanc, je l'ai reliée en 1981 à une expérience personnelle, survenue alors que j'étais âgé d'environ 18 ans. Je ne peux prétendre transmettre fidèlement cette expérience que j'ai occultée lorsqu'elle est survenue, car je ne pouvais l'intégrer alors à ma vision du monde. J'en ai consigné un récit dans ma première tentative romanesque, en partie autobio, en 1982 :
Un soir, je me couchai après une longue marche dans les rues de Paris. Me sentant dans un état étrange, je pris mon pouls, extrêmement lent (je crois me souvenir de 32). Alors que j'étais encore éveillé, une altération de ma conscience se produisit. Les molécules de mon cerveau semblaient s'éparpiller dans toutes les directions, d'une manière qui pourrait évoquer un essaim d'abeilles bourdonnantes. Les notions de direction, de mouvement, de vitesse n'avaient plus de signification. C'était soudain un fantastique élargissement d'une perception jusque là inconnue, une sorte de fusion totale, et ce qui restait conscient en moi n'en était qu'un spectateur frappé de stupeur. Au milieu de ce fourmillement se fit entendre une formidable voix. Les termes de voix, d'entendre, ne sont encore que des approximations. Il y eut d'abord une sonorité rappelant le bruit d'une prise de son au départ d'un enregistrement, puis je crus entendre une phrase dans un langage inconnu, mais dont le sens m'était délivré simultanément : Je ne suis pas ce que l'on croit.
Je repris mes esprits dans un complet désarroi. Après quelques instants, j'essayai de retrouver ce niveau de conscience, fermai les yeux : de nouveau le fourmillement, puis une image fixe m'apparut, la façade d'une maison biscornue dans une ruelle étroite et tortueuse.
Voilà. Je ne suis pas du tout certain d'avoir distingué une porte à cette maison, encore moins d'avoir été tenté de la franchir, mais j'ai par la suite volontiers associé ces éléments à ma vision, et ceci bien avant que Dick ait communiqué son expérience de février 74, ou encore qu'ait été révélé au grand public le phénomène NDE (La vie après la vie, 1975), l'expérience dite de "mort imminente", expression impropre à mon sens car le phénomène est loin d'être limité à cette situation.

Dick était un de mes auteurs de prédilection, et j'ai lu avec passion Substance mort à sa parution en 1977, mais je n'ai pas alors vu le parallèle entre l'expérience attribuée à Tony Amsterdam et la mienne. Je l'ai relu ensuite, idem, puis est paru Siva début 1981, où Dick indiquait la réalité de cette expérience, mais où les visions de la pluie d'étincelles et du seuil vers une autre réalité spatio-temporelle étaients disjointes, dans deux passages éloignés du roman. Ce n'est qu'à ma 3e lecture, à l'automne 81, que j'ai enfin entrevu la ressemblance de mon expérience avec celle de "Tony Amsterdam", ce qui m'a donné l'idée d'entreprendre le voyage vers la Californie, pour y rencontrer Dick.
J'ai caressé ce projet pendant quelques mois, jusqu'à l'annonce de sa mort le 2 mars suivant.

C'est bien plus tard qu'est paru Radio libre Albemuth, en 1987, où Dick donnait le récit le plus fidèle de son expérience, en l'attribuant à Nicholas Brady = 81 50. Ce n'est qu'en écrivant ce billet que je vois un écho avec ma naissance en 50 et la reconnaissance en 81 du parallélisme de mon expérience à celle de Dick. Je découvre par hasard aujourd'hui que le préfixe brady- signifie "lent", comme dans bradycardie; la corrélation m'a toujours paru évidente entre mon expérience et l'exceptionnelle lenteur de mon pouls constatée peu avant.
Je pense aussi au personnage Michel Drouin (= 50 81) de L'énigme du mort-vivant, suspecté en 1944 d'un crime comme son aïeul l'avait été en 1864, dans les mêmes exactes circonstances, ce qui me semble avoir été inspiré par Le triangle d'or, avec sa pluie d'étincelles de la nuit pascale du 4 avril 1915, et son 14 avril 1895 évocateur de Dreyfus, dont un actuel spécialiste est un autre Michel Drouin... Le Michel Drouin de 1864, innocent comme Dreyfus, avait fini au bagne de Cayenne...
Vertiges...

1 commentaire:

Unknown a dit…

Merci pour ce lien ; je n'ai pas tout lu, je garde ça au chaud pour plus tard mais je constate effectivement en bas de page que le tout a été posté à 08 : 13....
Je sais que tu ne crois pas totalement aux coïncidences,
en tous cas cela m'a fait plaisir d'avoir de tes nouvelles.

Amitiés mirambeaulaises (mirambolesques fleure bien mieux l'aventure)

BoRIS